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Sur FeelingBlabla, nous aimons tout autant pertinence ou impertinence... À vous de classer ce bulletin d'humeur signé Thierry Caens...!

 France, j’ai mal à ma trompette… !

Thierry Caens  

 caensThierryOui , La France va mal,  je pense en particulier au  petit monde de la Culture  (qui n’a pas passionné nos candidats à la présidence !). Il est clair que le contexte socio-économique n’est pas favorable mais j’estime que nous, musiciens, devons balayer devant notre porte.

 

J’ai choisi d’évoquer 2 évènements pour illustrer ma pensée (qui,  je le sais, est partagée par bon nombre de collègues et mélomanes). 

 Le trompettiste du siècle Maurice André vient de disparaître, ce qui en soi plonge le monde de la Musique (et en particulier ses élèves, dont je fais partie) dans une infinie tristesse. Cependant, c’est le silence assourdissant des grands médias (à part quelques fidèles comme Alain Duault et Frédéric Lodéon), des institutions devenues muettes (ou sourdes ?) qui nous plonge dans une grande incompréhension. 

Maurice André disparu n’est pas un sujet de fait divers, c’est une légende, un ambassadeur incontesté, un héritier du Siècle des Lumières (si cher à nos élites), un héros pour des générations de musiciens. Peu d’artistes répondent à cette description… Il fut l’exemple extraordinaire de cet ascenseur social que fut la musique, lui qui débuta à la mine dans le Sud et illumina les scènes du monde entier.   Pour toutes ces raisons, je pense (par exemple) que la rediffusion du 1er Grand Echiquier, que lui avait consacré Jaques Chancel, à une heure de grande écoute, serait un bon début de réconciliation.  

Le second évènement qui a provoqué ma colère s’est déroulé lors d’un concours de recrutement dans un orchestre du Sud Ouest de la France.  On cherchait à y recruter un Trompette solo ! Comme c’est devenu la mode dans notre pays qui a produit des génies comme Maurice André et David Guerrier, le concours fut déclaré insuffisant !   Je ne conteste pas la compétence du jury qui a peu apprécié le 1er tour en le qualifiant de « Nul », mais le fait qu’il a décidé d’arrêter là le recrutement.  2h15 pour écouter 22 candidats ! Répétition des candidats sur un piano électrique (sans enceintes), et une salle de « chauffe » au 2ème étage, alors que le concours se déroule au 5ème étage sans ascenseur ! Est-ce là une façon professionnelle et respectueuse d’organiser un concours ?

On peut aussi se poser la question des concours derrière un paravent qui ne règle rien, sinon de protéger les jurys soucieux d’influencer le vote par des manifestations gestuelles (je l’ai déjà constaté … !). Trouvez vous normal que le musicien sortant soit membre du jury pour son remplacement ?  Est-il juste que sur 22 candidats, les premiers jouent un programme complet, alors que les derniers n’en joueront que la moitié ? Comme si l’urgence de ne faire qu’un tour prévalait sur toute autre considération ? 

Lorsqu’on découvre les noms des candidats (malheureux) et qu'y figurent l’actuel trompette solo de l’Opéra de Paris et 4 ou 5 des plus brillants trompettistes du moment, on ne peut que déplorer le manque de  confiance accordé à ces musiciens en leur donnant l’occasion de convaincre au 2ème tour, et éventuellement au 3ème… ? Quand bien même le 1er tour n’aurait pas été « passionnant ».

Lorsque je parle de ces démons internes, je parle de la confiance envers les  jeunes générations, de l’amnésie qu’ont certains jurys qui ne se souviennent pas que lorsque nous avons passé les concours  (il y a  30 ans)  nous n’avons pas forcément été très bons la 1ère année. En outre le programme du concours ne ressemblait pas, comme aujourd’hui, a un marathon où seule la résistance physique peut convaincre !   Je parle aussi de ces chefs d’orchestre (et peut-être des trompettistes aussi !) qui, déclarant les concours insuffisants, grandissent leur prestige, deviennent irremplaçables … ?!  

Nous ne sommes que de passage, et a quoi servons nous si nous n’assurons pas aux générations futures les conditions d’une professionnalisation sereine ?   Allons-nous continuer à organiser des concours sans considérer la réalité du travail ? Ne serait-il pas plus judicieux, après 3 tours d’épreuves sérieuses, d’engager les 3 meilleurs du concours pour plusieurs séries ? et, à l’issue de la saison, en interrogeant les chefs, le pupitre et tous les membres de l’orchestre, il serait plus facile et plus juste de trouver le candidat idéal. Dans tous les cas, celui ci devra effectuer un stage d’1 an ! Ou alors, comme cela se passe souvent à l’étranger, d’intégrer le candidat dans le pupitre pour qu’il accède peu a peu aux postes de responsabilité.   Je parle de solidarité, de confiance, de fierté, de modestie, de respect.   C’est tout cela qui a manqué à notre pays pour accompagner Maurice André, et pour choisir nos successeurs.                     

Thierry Caens 


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